New York (1998)

New York
John Gibson est redevenu sympathique. J'ai écrit à la bombe un grand texte sur le temps sur son mur. J'ai l'impression qu'à New York tout le monde court après le temps et que mon titre "take your time" accroche bien.

Je dors "up town" chez Zabriskie au 19 ème étage parmi les gratte-ciels. C'est étonnant quand on n'en a pas l'habitude.

New York
Je tombe malade, j'ai des maux d'estomac. Je vais voir un docteur qui me met le doigt dans le cul et me demande 350 $. Je suis consterné.

Soirée chez Mekas avec mes films. Plein à craquer. Mes films ont beaucoup de succès mais moi je les trouve un peu ratés. C'est peut-être ça qui leur plait.

New York est fascinant. Tout le monde travaille. C'est vivant, positif et dynamique. Les petits boulots font rage. Sur tous les trottoirs, on peut installer un banc et vendre ce qu'on veut. Je visite un grand restaurant de quatre étages de monstres où on mange parmi les monstres.

New York
Toute la smalah française est là, Madame Chirac, Madame Pompidou, Lise Toubon et le lendemain matin Madame Trautmann qui regarde les installations avec scepticisme. Mon espace a du succès, mais il manque la vidéo. Je l'ai amenée avec moi mais ils ne l'ont pas installée.
Annette Messager : des pelochons accrochés sans grand intérêt 2/10
Bostanski qui tousse encore. Misérabiliste, 2/10
Sarkis avec son livre qu'il leur a fait publier 3/10. Il mêrite un point de plus parce qu'il est dans son espace vendant son produit. Ca fait rigoler.

Ben souvenir des années 62 rien de nouveau 2/10
Louise Bourgeois, on dirait du Sarkis d'il y a 15 ans. 3/10
Il n'y a que deux choses que j'ai aimées : les télévisions de Vilmouth (des petites tables, des chaises, et une télé qui vous parle avec un personnage pour vous tenir compagnie. C'est tout à fait ce qui nous arrive) et le suicide de l'artiste par Alain Séchas. C'est une vidéo d'une aiguille qui fait sauter une tête en ballon.
Robert Filliou, une caravane vide qui me semble être du mauvais Filliou, peut être un remake.

L'exposition a été conçue ainsi : un espace architecture, un espace art. Ca dessert les deux. On dirait que l'art est là pour aider l'architecture et vice-versa. A part les jours de vernissage, ça ne fonctionnera pas. Il y a trop de vidéos partout, trop de textes à lire. C'est trop sophistiqué. Il n'y a plus du tout les éclairages forts d'avant mais toute l'exposition est dans la pénombre. J'ai trouvé qu'il y avait trop de pénombre.

Le Gugenheim, comme presque tous les musées aujourd'hui, fonctionne avec des boutiques au point où ils font rentrer et sortir les gens par la boutique.
J'ai aussi remarqué que les gens visitaient les boutiques, achetaient un poster de Lichtentein mais n'entraient pas dans le musée voir l'original.

Sophie Calle
Trop de textes à lire mais j'aime toujours. 4/10

Jean Pierre Raynaud
Un couloir en carreaux blancs. 4/10. Ca me fait penser : tiens les autres artistes ont pu faire les installations qu'ils voulaient et à moi on m'a imposer ce que je devais montrer et on ne m'a même pas installé la vidéo.

Ben
J'écris à côté de ma vitrine un grand statement en anglais qui dit : depuis Duchamp et John Cage vous pouvez quitter ce musée et aller dans la rue voir ce qui s'y passe.

New York
Ce qui me fait du bien c'est que j'ai quitté le panier de crabes culturel de Nice.
Up town grand vernissage
Je commence la visite par en bas. Je suis impressionné par une suite de cartes postales c'est-à-dire de tableaux qu'on connait par coeur parce qu'on les a vus dans tous les livres. On m'explique l'accrochage. Il y a la collection du Gugenheim et la collection du centre Pompidou. Un genre de jeu d'échec où chacun pose un tableau. Exemple type : les Américains accrochent Pollock, les Français répondent avec Masson. Les Américains accrochent Ryman et les Français répondent avec Buren. Ce qui aurait été bien c'est que lorsque les Américains ont accroché Laurence Wiener, les Français devaient accrocher un Ben de 63 à 70 pour leur faire la pige et nous aurions marqué deux points de plus.
Ceci dit pour l'expo générale si on ne regarde pas les étiquettes l'Europe bat l'Amérique 8 à 2. Pourquoi ?
Parce que la collection du Gugenheim est à 60 % européenne. Ils accrochent ce qu'ils ont acheté, du Matisse, du Kandinski, du Rouault, du Picasso etc etc
Ils n'ont pas accroché Hoper ou de la peinture vraiment américaine.
Ce qui donne l'impression générale d'une exposition européenne.
Si par contre on regarde les étiquettes on est obligés de reconnaître que quelques unes des plus belles pièces de nos artistes européens appartiennent au Gugenheim.

Johen Gerz fait une variation de sous Ben avec "je vis je vis" que les gens effacent avec leurs pieds.

Je croise Blistène au bord de l'évanouissement.

Lavier qu'on déplace trois fois fait un scandale.

Ben :
Ce n'est pas que je n'aime pas la Vitrine de Londres mais s'ils avaient montré mon Magasin ça aurait été la meilleure pièce de l'expo.

Nuridsani du Figaro est furieux parce qu'on ne l'a pas laissé rentré.

Mon exposition chez Zabriskie
Je fais une installation avec plus de 150 photos. L'accrochage est difficile parce qu'ils n'en ont pas l'habitude. Bernard Bonaz m'aide beaucoup. Virginia trouve mes prix trop bon marché et les augmente de 20 %. Elle a raison certains sont ridiculement bas.
Au vernissage il y a beaucoup de monde et parmi les visiteurs, une bonne surprise, Moris d'Image Bank et deux filles extraordinaires, Mollie et Vanessa qui parlent beaucoup d'amour mais que je soupçonne d'être à la CIA. Elles en savent trop long sur tout et tout le monde. La journaliste du New York Times semble intéressée. Elle n'arrête pas de prendre des notes. Au moins j'aurais peut-être un article dans ce journal ce qui rendra les autres artistes jaloux.

Zabriskie
Diego Cortez, qui m'aime bien depuis vingt ans, vient acheter 15 pièces avant le vernissage.
New York
Ce qu'il y a d'universel dans toutes les villes : Istambul, New York, Paris, Le Caire, c'est les belles femmes dans les rues : vives, jeunes, tête haute, travailleuses, dynamiques, c'est beau à voir.

New York
Avec Bernard Bonaz on va pour acheter une caméra sur Times Square, espace de publicité énorme et vraiment impressionnant. Le vendeur nous propose une caméra HI 8 dernier modèle à 3.500 F
Je vais pour l'acheter. Il nous dit "j'ai mieux que ça" et nous entraîne dans le fond du magasin. Là il essaie de me vendre un Sharp à 10.000 F.
Entre temps, il nous demande si je veux payer cash ou par carte bancaire. Je dis Cash. Ensuite, je n'aime pas le Sharp, je désire acheter le petit Sony du début. Il refuse de me le vendre. On insiste, mais il nous met à la porte et on découvre qu'on est observés par deux individus louches avec talkie walkie. On a tout juste le temps de s'engouffrer dans un taxi. Je dis à Bonaz : on nous parle de la mafia de Moscou c'est pire ici.

New York
Je suis certain qu'à la première grande crise les communautés vont se recroqueviller sur elles-mêmes et l'éclatement ne sera pas loin. Mais une politique pluri-culturelle et multi-culturelle avec quota et reconnaissance des minorités pourrait désamorcer le conflit.

New York
J'achète les journaux. Les New Yorkais ne s'intéressent pas du tout à la politique internationale.
Le complexe de supériorité américain est de mise. C'est comme si l'Amérique avait toujours toujours raison. Il n'y a pas le moindre doute sur ce point nulle part dans la presse.

U.S.A
Mon impression générale est que l'Europe partout gagne du terrain même en modernité. Il y a plus de téléphones portables en Europe qu'aux Etats Unis. On dirait ici que tout est compartimenté. Les très riches entre eux, la petite bourgeoisie entre elle et les pauvres entre eux. Indiscutablement la population noire reste la plus angoissée, stressée et opprimée. Ca se voit dans le regard des jeunes dans le métro. Il y a de l'énergie partout et une envie de survie partout, un grand respect du travail et des petits boulots. Question bouffe je préfère l'Europe. Presque tout est servi dans des verres en carton y compris les expresso.
L'escroquerie gagne du terrain partout; Les gros escroquent les petits et les petits escroquent les plus petits. Ca s'appelle plus escroquerie ça s'appelle"travailler". L'Amérique a décidément des pieds d'argile. Elle a des systèmes de survie, pour se rétablir : sa créativité. Mais je prévois toujours l'éclatement des Etats Unis pour dans 20 ans. L'Espagnol se parle couramment à NY et les hispaniques ne veulent pas perdre leurs racines. Ils se baladent avec des Walkmans diffusant de la musique espagnole.

Gugenheim
Je ne veux pas être méchant, mais je trouve qu'aucune des deux expos n'avaient un vrai souffle. L'expo up town faisait "carte postale consécratoire" et
"down town " avant garde réchauffée et architecture semi-désuète. Au fond les architectes me font suer. La seule architecture valable est celle qui est réaliste et qui s'occupe des besoins et non pas de l'ego de l'architecte qui lui s'embarque toujours dans de l'inutile couteux.

Aéroport de New York. Mes bagages, comme d'habitude, se sont perdus et je les attends pendant une demi-heure. Pendant ce temps le taxi m'attend.

New York
Chose étonnante : on trouve Flash Art dans tous les kiosques.

New York
Le pouvoir des médias n'est pas une illusion mais une réalité. Ici les gens pensent ce que la télé leur dit de penser, tous sans exception et ils usent même du même vocabulaire. Ca m'impressionne.

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