FIDJI

République des Fidjis
Capitale : Suva
Superficie : 18 274 km 2
Population : 780 000 hab.

Peuplement

La société fidjienne est une véritable mosaïque ethnolinguistique, culturelle et religieuse avec cependant une double dominante ethno-culturelle : aux Fidjiens de souche, christianisés, font face des Hindis, brahmanistes pour l'essentiel.

1) Fidjiens
Avec les Rotumans qui leur sont étroitement apparentés, les Fidjiens forment l'élément autochtone de l'archipel des Viti, ou Fidji. Au nombre de 300.000 environ, ils sont minoritaires dans leur propre pays et ce, depuis la fin de la 2ème Guerre mondiale. Agriculteurs, pêcheurs, propriétaires terriens ou militaires, ils dominent la vie politique de l'archipel depuis l'indépendance. Largement christianisés, ils continuent néanmoins à préserver leur mode de vie traditionnel et leur culture océanienne.
Leur langue austronésienne, intermédiaire entre les langues de Mélanésie et de Polynésie et Micronésie, est officielle. Mais du fait de la grande hétérogénéité des idiomes pratiqués, c'est l'anglais qui sert de langue véhiculaire.

2) Autres Océaniens
De petites communautés de Mélanésiens, Maoris et Micronésiens ayant immigré aux Fidji pour des raisons démographiques ou économiques, complètent le tableau des populations de culture océanienne.
Les Micronésiens Banaban, originaire de l'île Océan, ont, après bien des vicissitudes, été installés dans la petite île de Rabi en 1945. Cultivant leurs plantations de cocotiers, ils méritent de pouvoir conserver là l'équilibre qu'ils y ont trouvé.

3) Anglo-saxons
Quelques milliers d'Anglais, Australiens et Néo-Zélandais maîtres des plantations et de l'import-export, constituent une population coloniale typique dont le rôle n'a nullement été redimensionné par l'indépendance. Ils ne posent pas de problème particulier étant donné les liens qui unissent les Fidji à l'ancienne métropole et à l'Australie.

4) Hindis
Entre 1879 et 1916, les colons britanniques importèrent aux Fidji une forte communauté indienne dont ils avaient besoin pour cultiver la canne à sucre, les autochtones s'étant montrés peu intéressés par le semi-esclavage qu'on leur proposait.
La plupart étaient originaires de l'Inde du Nord et pour l'essentiel d'ethnie hindie (hindous, musulmans, sikhs, biharis). D'ouvriers agricoles qu'ils étaient et qu'ils demeurent pour une bonne part, ils ont petit à petit accaparé l'essentiel du commerce et les professions libérales. De ruraux confinés dans les zones de plantations, ils sont maintenant nombreux dans la capitale où leurs enfants fréquentent massivement l'Université du Pacifique-Sud. Au moins aussi nombreux que les Fidjiens, ils aspirent avec les autres Indiens à occuper leur part de responsabilités politiques, eu égard à leur poids démographique et économique.

5) Autres Indiens
De l'Inde du Nord, sont également venues des minorités gujrat et bengalie représentées par quelques dizaines de milliers de membres. En plus grand nombre, la communauté indo-dravidienne forte de plus de 100.000 personnes et à dominante tamoule, constitue un groupe non négligeable. Hindis et autres populations indiennes ont conservé leurs caractéristiques culturelles et religieuses. Le métissage n'existe pas chez elles et l'usage des langues d'origine est très respecté, l'anglais servant de lingua franca générale.

6) Chinois
Le monde asiatique est également représenté par une communauté de plusieurs milliers de "Chinois", originaires comme c'est souvent la règle dans ces contrées, de la région de Canton. Ces Yué, c'est leur nom ethnique, sont de discrets et efficaces commerçants dans l'import-export.

Historique

Peuplées dès 800 av. J.C., par les ancêtres des Fidjiens, les Viti ne semblent pas avoir connu d'unification politique à un quelconque moment de leur histoire. Intégré quelque temps dans l'empire maritime maori de Tonga (XVIe s.), l'archipel fut "découvert" par le Hollandais Tasman en 1643. Les Anglais l'annexèrent en 1874, les chefs coutumiers ayant exigé toutefois dans l'acte de cession que plus de 80% du territoire demeurât aux mains des Fidjiens. Devant le manque de coopération des indigènes, les Anglais furent amenés à importer massivement de la main d'oeuvre indienne pour développer la culture de la canne à sucre. Ce qu'ils firent jusqu'en 1916.
Les Fidji n'allaient pas être trop touchées par les deux Guerres mondiales, des troupes de choc fidjiennes allaient toutefois se distinguer aux îles Salomon contre les Japonais.
Lorsqu'en 1970 poussés par la majorité indienne, les Anglais accordèrent l'indépendance à leur colonie, les Fidjiens exigèrent une large prééminence dans l'appareil étatique et le contrôle de l'armée et de la police en plus du maintien de leur monopole foncier. L'archipel devenait membre du Commonwealth mais au grand dam des Indiens, l'indépendance leur échappait. Tempérés par l'empreinte britannique et le bons sens de beaucoup, les rapports entre autochtones et populations rapportées restèrent pacifiques, quoique tendus. De ce fait, l'État fidjien pouvait être donné en exemple d'une décolonisation réussie. Cependant, les frustrations sociales et politiques de la communauté indienne s'accroissaient, avivées par l'élévation du niveau culturel de sa jeunesse dont une grande partie étudiait à la prestigieuse Université de Suva. Mineurs politiquement, les Indiens allaient finir par atteindre démocratiquement le pouvoir auquel ils aspiraient.
Lors des élections de 1987, le parti de la Fédération nationale à dominante hindoue, s'alliait au parti travailliste, parti mixte également , pour former une gouvernement d'union dirigé par un premier ministre fidjien mais comportant une majorité de ministres indiens. Cette rupture du précaire équilibre établi depuis l'indépendance suscita bien des remous au sein de la population fidjienne. Peu de temps après, un coup d'état des militaires fidjiens mettait fin à cette tentative d'union nationale". Condamnés par la communauté internationale, les putschistes n'en obtenaient pas moins après une période d'incertitudes, une révision de la Constitution légitimant la domination politique des autochtones et renforçant leur représentation parlementaire. C'en était trop pour bien des Indiens, qui se sentant définitivement exclus et minorisés, décidaient d'abandonner le pays. Bien que peu de violences aient été à déplorer , nombreux étaient ceux qui prenaient alors le chemin de l'exil.

Perspectives

Les Fidjiens avaient su composer avec l'impérialisme britannique de façon somme toute, satisfaisante. Cependant, leur légitime refus de subir l'embrigadement dans les plantations allait, avec l'immigration massive des Indiens, leur jouer plus tard un mauvais tour.
Avec l'indépendance arrivait la hantise de se voir à terme déposséder de leur territoire. Cette inquiétude ne pouvait que les renforcer dans leurs crispations alors même que les Indiens concourraient de façon non négligeable à leur enrichissement collectif. Or ceux-ci ne pouvaient être éternellement tenus à l'écart des responsabilités politiques
Les droits des autochtones ne peuvent être sous-estimés, c'est indéniable. D'autre part, l'expulsion pure et simple des Indiens que préconisent certains extrémistes fidjiens serait une aberration humaine et économique tant sont étroits les liens d'interdépendance entre les différentes ethnies.
Afin de réduire les tensions au maximum, il semble souhaitable , d'une part, que les allogènes désireux de demeurer définitivement aux Fidji fassent l'effort d'intégrer les valeurs océaniennes à leur propre vision du monde et adop-tent notamment la langue fidjienne.. Parallèlement, les Fidjiens sont appelés à évoluer et doivent faire montre de plus d'ouverture à l'endroit de leur compatriotes.
D'autre part, et ce d'autant que la rente sucrière n'est pas assurée pour toujours, il y a lieu d'ores et déjà, d'organiser le transfert de tous les allogènes sans distinction d'origine, qui sont peu disposés à s'assimiler et auxquels doivent être ouvertes les portes de l'Australie sous-peuplée. Bien avant le coup d'état, un courant d'immigration existait vers ce pays ; celui-ci devrait être encouragé dans le cadre d'une implantation programmée non soumise à la pression des événements.
Si le regroupement d'une bonne partie des communautés indiennes émigrées en Asie du Sud-Est, en Océanie, voire aux Amériques, peut sembler à terme la solution à bien des problèmes ethniques, il va de soi que les peuples anglo-saxons ont la responsabilité historique d'organiser ou d'aider à ces transferts. N'ont-ils pas été et ne continuent-ils pas d'être les premiers bénéficiaires des "plantations " qu'ils firent de milliers de travailleurs indiens dont ils étaient les colonisateurs ?
Bien que de réalisation délicate, les deux voies complémentaires évoquées ci-dessus paraissent les seules à résoudre pacifiquement les problèmes de l'archipel des Fidji et ce, de façon durable. Un règlement efficace de la question fidjienne pourrait servir d'exemple pour bien d'autres cas dans la région ou ailleurs.
Retrouvant leur sérénité, la main tendue des Fidjiens pourrait être un gage du maintien de la prospérité et donc du rayonnement culturel et politique de leur petit pays. Sa position géographique et l'influence de son Université du Pacifique-Sud lui attribuent en effet une position éminente dans la perspective d'une intégration océanienne équilibrée face à la montée en puissance de l'Australie.
Quant à la petite armée fidjienne, son rôle de force onusienne est particulièrement exemplaire et c'est à celui-ci qu'elle pourrait se consacrer totalement si elle était, une fois pour toutes, délivré du "péril allogène".

Jean-Louis Veyrac 1993

tableau des populations, ethnies, langues, religions

-> retour a la liste