INDIVIDUS - BEN PAR BRUNO DUVAL - 2008-08-07

puisque elle devait etre lu a ma soiree du 18 juillet voici le texte de Bruno Duval
UN TEXTE QUE JE TROUVEREMARQUABLE ET MYSTERIEUX

BIG BEN,
Voici le message que, sur sa demande, j'avais confié à Gilbert Baud pour le lire au cours de ta dernière soirée. Malheureusement, il n'a pas pu venir, à cause des séquelles d'une récente intervention chirurgicale.
Pas question d'essayer te défendre d'avoir soudoyé l'homme de l'art.
C'EST SIGNÉ. Il y a BEAU temps qu'il est fini, le temps BÉNI des jolies colonies de vacances en France de mon enfance, quand j'avais fait le pari de regagner un jour, pour y faire les BEAUX-ARTS, le Paris de ma naissance, en 1947. Manque de pot, en 1961, mon père, quittant Tunis, a préféré échouer à Nice, où il y avait toujours le soleil, la mer, et pas mal de rapatriés d'Algérie.
Après avoir fait le médecin rue El Djezaïra, il a continué avenue de la Victoire,
future avenue JEAN, MAIRE DE NICE.
Moi, entre le domicile familial avenue de Provence, à Cimiez, et le bar Le Provence, à la sortie du lycée Masséna, JE M'EMMERDE À NICE (à l'envers, ça se lit CINÉ).
Comme, à Tunis, ma mère m'envoyait chez Mohamed, pour aller chercher le sel, de mon propre chef, je vais chez BEN, pour aller chercher les dernières nouvelles de l'art. Dans l'ensemble, elles me déçoivent, car, depuis Picasso, Matisse et Duchamp, elles ne sont pas vraiment nouvelles.
Le Beau, comme catégorie artistique, n'ayant plus sa place au soleil, pour réussir en art, il suffit de FAIRE LE BEAU.
Mais, si je dois faire le beau, c'est que, par nature, je ne le suis pas vraiment.
Pourtant, quel succès ! Dans le genre beau ténébreux, vous auriez dû me voir à cet âge-là (sur la photo de classe, je suis à côté de BAUD, Roger).
Partout où je passe, je fais des ravages, même si je suis trop intimidé pour m'en apercevoir.
BEN EST JALOUX. Quand je l'invite à mes fiançailles, il envoie un télégramme à mes parents:
MARIAGE IMPOSSIBLE STOP BÉATRICE EST UN HOMME.
Ça n'a pas amélioré l'état de mes relations familiales.
Sous prétexte de te porter au pinacle, il t'enfonce devant les gens d'art qui passent à sa boutique en disant "Voilà le plus beau !" pour que, sous le coup de l'émotion, tu laisses tomber ton camembert de Normandie (Duval, Duchamp, même combat).
La Fontaine, c'est pas nouveau, mais c'est encore beau, comme U RIT NOIR (Ben: "J'aime pas les jeux de mots").
Pour faire la nique Ben, il fallait soit entrer aux Arts-déco à côté de chez lui, soit prendre la poudre d'escampette.
Ayant échoué au concours d'entrée, j'ai quitté Nice par la Savoie.
Je ne savais pas que, selon le marquis de Bièvre, la Pati faisait "des biscuits de sa voix".
Avec mon grand-père, qui faisait sa cure à EVIAN j'ai contresigné des accords déviants.
Tombant sous le coup d'une interdiction de séjour, je me suis réfugié à Genève, pour apprendre à écrire des lettres sans faire "trop de jeux de mots" (dans la ville de Calvin, on ne rigole pas avec l'intégrité de la langue française).
C'est là que je suis tombé dans les pattes de Benjamin Vautier, peintre de la rue et neveu de Benjamin Vautier, peintre officiel du gouvernement suisse.
Ben, son petit-neveu de la main gauche, avait demandé à son oncle l'autorisation de signer, lui aussi, Benjamin Vautier, mais il ne l'a pas obtenue, alors il a signé , de la main droite, BEN.
De tous les Benjamin Vautier maintenant c'est lui l'aîné.
À force de faire du nouveau, il a fini par faire l'Ancien (Fluxus, ça n'amuse plus personne, d'ailleurs, moi, ça m'a jamais amusé, j'avais déjà compris que c'était pas le but visé).
En signant la peinture des Martin, donc des ânes, Lavier m'a, sans le savoir, plagié, en faisant les poches de Raymond, Boronali qui n'a jamais osé peindre avec sa queue (moi non plus).
En découvrant sur google l'existence de l'autre Benjamin Vautier, BIG BAUD (Gilbert) aussi.
La Suisse ne comptant pas, pour avoir le droit de signer Duval, je n'avais qu'une solution: regagner enfin, avec la JEUNE EVE assez NAÎVE pour me suivre, le Paris de ma naissance, d'où j'ai écrit à Ben JE PENSE DONC JE SUISSE.
Bien sûr, il m'a piqué cette idée-là aussi.
Alors, j'en ai une autre à lui proposer, d'après Orson Welles dans le Troisième homme.
UNE IDÉE SUISSE, C'EST UNE SUICIDÉE.
Bruno Duval



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